Mettre en place une commande publique verte - e-doc CACEM

La commande publique constitue un puissant levier de promotion du développement durable. De nombreux textes incitent voire obligent l'acheteur à « verdir » ses achats.

La commande publique constitue un puissant levier de promotion du développement durable. De nombreux textes incitent voire obligent l'acheteur à « verdir » ses achats.

PNAD

La France élabore un Plan national pour les achats publics durables (PNAD), dont la troisième édition portant sur la période 2022-2025 vise à accompagner le déploiement des avancées de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, dite loi Climat et résilience, en matière de commande publique, à savoir l’intégration d’une dimension environnementale et sociale dans tous les contrats de la commande publique, d’ici à cinq ans.

TEC 373

Propriété: La Gazette

Comme le souligne le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, "cette loi vient couronner une série d’avancées législatives qui poussent les acheteurs à se saisir des enjeux de développement durable (loi Agec, loi Egalim, etc. ). La commande publique, qui représente plus de 8 % de notre PIB, constitue un véritable levier de transition écologique".

Le plan comprend deux objectifs : atteindre, d’ici à 2025, 100 % des contrats de la commande publique notifiés avec au moins une considération environnementale et 30 % avec une considération sociale. Il est composé de deux axes, déclinés en vingt-deux actions. Le premier axe consiste à aider les acheteurs à s’emparer des objectifs du PNAD : donner aux acheteurs des outils opérationnels pour se saisir de ces enjeux, améliorer leur capacité à identifier une offre satisfaisant leurs exigences environnementales et sociales, développer la formation et l’accompagnement opérationnel. Le second axe consiste à mobiliser, animer, promouvoir et suivre le PNAD.

 

Le Spaser

Le schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (Spaser) est obligatoire depuis la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014, relative à l’économie sociale et solidaire, dite loi ESS, pour les collectivités territoriales et leurs groupements dont le montant total annuel des achats est supérieur à 100 millions d’euros HT (seuil abaissé à 50 millions d’euros depuis le 1er janvier 2023 à la suite de la loi n° 2021-1104 précitée). La loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023, dite loi Industrie verte, étend cette obligation à l’État et à tous les acheteurs soumis au Code de la commande publique (CCP).

Le Spaser constitue la feuille de route de l’acheteur en matière d’intégration du développement durable dans les achats publics. Il s’agit d’un outil de performance et de mesure de l’achat public durable.

Le schéma détermine les objectifs de passation de marchés publics comportant des éléments à caractère social, visant à concourir à l’intégration sociale et professionnelle des travailleurs handicapés, ou défavorisés, et des éléments à caractère écologique ainsi que les modalités de mise en œuvre et de suivi annuel de ces objectifs La loi précitée du 22 août 2021 vise à renforcer à la fois la transparence sur les Spaser et à en préciser leur contenu. Les acheteurs peuvent inscrire leur Spaser dans la continuité du Plan national des achats durables 2022-2025 et leurs objectifs associés (100 % des contrats de la commande publique notifiés avec au moins une considération environnementale et 30 % avec une considération sociale en 2025).

 

Verdissement

La loi Industrie verte poursuit le verdissement de la commande publique dans le prolongement de la loi Climat et résilience. À ce titre, l’article L.2111-3 du CCP est modifié et ouvre la possibilité de mutualiser l’élaboration d’un Spaser.

Concernant l’offre économiquement la plus avantageuse, la loi précise que l’appréciation de cette offre pourra "tenir compte du meilleur rapport qualité-prix, qui est évalué sur la base de critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux" (CCP, modification de l’article L.2152-7). La définition législative de cette notion ne se limite désormais plus aux aspects purement financiers des offres.

Deux nouveaux dispositifs d’exclusion des candidats sont prévus. Le premier concerne les entreprises ne satisfaisant pas à leur obligation d’établir un bilan de leurs émissions de gaz à effet de serre (CCP, nouveaux articles L.2141-7-2 et L.3123-7-2). Le second est une exclusion concernant la publication d’informations en matière de durabilité.

Les entités adjudicatrices bénéficient également de simplification. Ainsi, la loi simplifie la passation des marchés conclus par les entités adjudicatrices dont les activités, notamment de production et de distribution d’énergie, de traitement et de distribution d’eau ou de transport de passagers, qui jouent un rôle moteur dans la transition énergétique nationale. Le texte prévoit, ainsi, que ces dernières peuvent déroger au principe d’allotissement en cas de risque de procédure infructueuse (CCP, modification de l’article L.2113-11).

La loi prévoit également que ces dernières peuvent déroger à la durée de droit commun des accords-cadres lorsque le respect de cette durée présente un risque important de restriction de concurrence ou de procédure infructueuse (CCP, modification de l’article L.2125-1).

Enfin, la loi autorise la présentation d’offres variables selon le nombre de lots susceptibles d’être obtenus pour les marchés répondant à un besoin dont la valeur estimée est égale ou supérieure à un seuil qui sera fixé par voie réglementaire (CCP, modification des articles L.2151-1 et L.2152-7).

 

ENR

Certains textes concernent indirectement la commande publique mais doivent être pris en compte par les acheteurs. Ainsi, la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (ENR) a pour objectifs principaux de planifier les projets d’ENR, de simplifier les procédures, de mobiliser du foncier pour le solaire et l’éolien et de mieux partager la valeur des ENR.

Elle impacte les marchés publics car elle vise à faciliter le recours aux "Power purchase agreement" (PPA). La durée du marché pourra tenir compte du temps d’amortissement des équipements ENR même si ceux-ci n’appartiennent pas à la collectivité.

Elle pose comme obligation de faire la publicité du lieu de fabrication des dispositifs de production d’énergie solaire pour les entreprises de plus de 200 salariés en France.

 

Obsolescence programmée

L’obsolescence programmée est un défi majeur dans la gestion durable des ressources. La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et pour une économie circulaire, dite loi Agec, avait fixé un objectif de transformation de l’économie linéaire (produire, consommer, jeter) en une économie circulaire.

Ainsi, l’article 16 de la loi Agec a rendu obligatoire l’affichage d’un indice de réparabilité.

Depuis janvier 2024, cet indice est remplacé par un nouvel indice de durabilité. Il complète le premier indice quand il existe pour un produit en y incluant notamment de nouveaux critères tels que la fiabilité et l’amélioration logicielle et matérielle du produit. Ce nouvel indice a pour objectif d’être plus complet et de mieux informer le consommateur en donnant notamment des informations sur la longévité du produit. Ainsi, les vendeurs auront l’obligation d’afficher ce nouvel indice sur leur produit. Il offrira aux consommateurs une évaluation complète de la durabilité des produits, grâce à une notation de 1 à 10 accompagnée d’un code couleur.

Cet indice agrège les mesures de l’ancien indice de réparabilité gouvernemental français auquel de nouveaux indicateurs d’évaluation de la fiabilité sont ajoutés (la liste des critères diffère en fonction des catégories).

Les appareils les plus réparables, faciles d’entretien ou évolutifs, obtiendront la note la plus élevée.

Le score de l’indice sera le résultat de cette évaluation multicritère, dont la grille sera téléchargeable sur le site du ministère de la Transition écologique, pouvant comporter une pondération de certains indicateurs.

La durabilité des produits est l’un des leviers clés pour réduire l’impact environnemental de notre consommation. En effet, la phase de fabrication et d’extraction des matières premières concentre pour la plupart des produits, et en particulier pour les équipements électroniques et numériques, la majorité des impacts et pollutions.

La prise en compte de l’indice de durabilité peut se faire, au choix de l’acheteur, lors de différentes étapes du marché. Ainsi, dans la définition du besoin, l’acheteur peut inscrire dans l’objet du marché la volonté de favoriser les équipements avec la durée de vie la plus longue possible pour limiter leur renouvellement, ce qui implique de préférer les équipements les plus réparables. Dans les critères d’attribution, l’acheteur peut inscrire un critère ou sous-critère environnemental relatif à l’indice de durabilité, ou les éléments équivalents suivants si le produit ne dispose pas d’un indice.

 

Réemploi, réutilisation et recyclage

Le décret n° 2024-134 du 21 février 2024 modifie la liste des biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées ainsi que, pour chacun d’eux, la part minimale des acquisitions qui doit être issue des filières du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage.

Il accroît, à compter du 1er juillet 2024, la part des acquisitions de biens issus de l’économie circulaire par les acheteurs publics de l’État et des collectivités territoriales. Pour cela, il modifie la liste des produits visés ainsi que, pour chacun d’eux, la part minimale des acquisitions qui doit être issue des filières du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage.

Il fixe également une progression pluriannuelle de ces pourcentages jusqu’en 2030. Ces acquisitions peuvent être réalisées via un achat public à titre principal ou accessoire. Le décret donne par ailleurs la possibilité de comptabiliser les dons.

Enfin, il rajoute les sacs-poubelles en plastique à usage unique aux produits pouvant faire l’objet d’une exemption à l’interdiction d’acquisition par l’État de produits en plastique à usage unique.

Dix-sept familles de biens sont concernées dont trois catégories intéressent particulièrement le BTP : les bâtiments modulaires ou préfabriqués, le mobilier urbain et le matériel d’entretien des espaces verts.

Un premier arrêté du 29 février 2024 fixe la liste des produits relevant des dix-sept familles de biens soumis à cette obligation d’acquisition de biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées.

Un second arrêté daté du même jour fixe la grille de valeur forfaitaire permettant la comptabilisation des acquisitions de dons de biens d’occasion en état d’usage réalisées dans le cadre cette obligation. La valeur monétaire des différentes catégories de bâtiments modulaires ou préfabriqués listées est comprise entre 150 et 299 euros. Ces deux arrêtés entrent en vigueur le 1er juillet 2024 en même temps que le décret.

Source: La Gazette, le 22/05/2024

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