Délit de séparatisme, encadrement de l'instruction, contrat d'engagement républicain pour les associations, lutte contre la haine en ligne, meilleure transparence des cultes ...Quelques mesures phares de la loi qui a pour objectif de lutter contre le séparatisme et les atteintes à la citoyenneté.
1- Le renforcement de l’obligation de neutralité du service public
Pour renforcer la laïcité et la neutralité, le texte énonce que ces principes s'appliquent aux salariés des titulaires de contrats de marché public, des concessionnaires, des bailleurs sociaux et des organismes qui ont une mission de service public (SNCF réseau, RATP, Aéroports de Paris, sociétés HLM...).
Un référent laïcité et une journée de la laïcité le 9 décembre de chaque année seront mis en place dans les administrations.
Le préfet pourra déférer les actes des collectivité locales qui porteraient gravement atteinte à la laïcité ou à la neutralité dans un service public (cantines, équipement sportifs...) et en demander la suspension au juge administratif, qui aura 48 heures pour décider.
Un nouveau délit de séparatisme vient protéger les élus et agents publics contre les menaces ou violences pour obtenir une exemption ou une application différenciée des règles du service public. Les agents publics pourront, par ailleurs, signaler via le dispositif d'alerte existant les menaces ou atteintes à l'intégrité physique dont ils sont victimes. En réponse à l'assassinat terroriste de l'enseignant Samuel Paty, les députés ont créé un délit d'entrave à la fonction d'enseignant.
2- Renforcement du contrôle des associations et nouveau contrat d'engagement républicain
Les associations ou fondations, qui demandent une subvention publique, devront s'engager à respecter le caractère laïque et les principes de la République (égalité femme-homme, dignité humaine, fraternité...) dans un "contrat d'engagement républicain". Si elles violent cette obligation, la subvention devra être remboursée. Le respect du contrat devient une condition pour l'obtention d'un agrément ou la reconnaissance d'utilité publique.
Dans une réserve d'interprétation, le Conseil constitutionnel a jugé que le retrait de la subvention ne saurait, sans porter une atteinte disproportionnée à la liberté d'association, conduire à la restitution de sommes versées au titre d'une période antérieure au manquement au contrat d'engagement.
Le contrôle par l'État des associations sportives et des fédérations sportives est renforcé. Les associations agréées seront aussi soumises au contrat d'engagement républicain.
La liste des motifs de dissolution des associations est complétée. Les associations pourront se voir imputer des agissements commis par leurs membres, agissant en cette qualité, ou des agissements directement liés à leurs activités. Le texte voté par le Parlement prévoyait, qu'en cas d'urgence, le ministre de l'intérieur pouvait prononcer la suspension d'une association, dans l'attente de sa dissolution. Le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition. Il a considéré qu'en permettant la suspension des activités d'une association faisant l'objet d'une procédure de dissolution sur le fondement de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure en cas d'urgence et à titre conservatoire, pour une durée maximale de trois mois, renouvelable une fois, cette disposition portait atteinte à la liberté d'association.
Les fonds de dotation, outil de financement du mécénat, seront mieux contrôlés par les préfets. L’administration fiscale pourra vérifier que seules les associations qui remplissent les conditions prévues par la loi peuvent bénéficier de la générosité du public et délivrer des reçus fiscaux.
À l'initiative des députés, les financements étrangers reçus par les associations loi 1901 qui touchent plus de 153 000 euros de dons par an et par les fonds de dotation seront contrôlés.
3- Nouveau délit face à la haine en ligne
Un délit de mise en danger de la vie d'autrui par diffusion d'informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle sera puni de 5 ans de prison et 75 000 euros d'amende si la victime est un agent public, un élu ou un journaliste ou si elle est mineure.
Afin de lutter contre les sites miroirs qui reprennent des contenus illicites déréférencés ou bloqués par la justice, une nouvelle procédure est mise en place (loi dite Avia du 24 juin 2020 visant à lutter contre les contenus haineux sur internet, en grande partie censurée par le Conseil constitutionnel.)
La comparution immédiate est désormais prévue pour les délits de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse(nouvelle fenêtre) (provocations publiques à la haine ou à la violence, négationnisme...). Cette procédure rapide de jugement ne concernera pas les contenus contrôlés par des directeurs de publication de presse (régime de la responsabilité en cascade). Il s'agit de sanctionner les abus les plus graves et manifestes à la liberté d'expression, favorisés par les réseaux sociaux.
Un nouveau régime de modération des contenus illicites est imposé - jusqu'à la fin 2023 - aux plateformes en ligne (procédures de traitement des demandes judiciaires, information du public sur le dispositif de modération, évaluation des risques...). Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) devra superviser les processus de modération mis en place par les réseaux sociaux, plateformes de partage de vidéos, moteurs de recherche... et pourra prononcer des sanctions financières (jusqu'à 20 millions d'euros ou 6% du chiffre d'affaires mondial).
4- Instruction des enfants et mesures sur la famille
La scolarisation de tous les enfants dans un établissement scolaire devient obligatoire à la rentrée 2022 et l'instruction d'un enfant en famille dérogatoire. L'école à la maison sera soumise à autorisation (et non plus seulement à déclaration) et accordée uniquement pour quatre motifs :
- état de santé ou handicap de l’enfant ;
- pratique d’activités sportives ou artistiques intensives ;
- itinérance de la famille ;
- situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif.
Une autorisation de plein droit jusqu'en 2023-2024 a été prévue par les députés pour les familles pratiquant déjà l’instruction en famille dans des conditions satisfaisantes.
Les écoles privées hors contrat devront répondre à de nouvelles obligations. Un régime de fermeture administrative des écoles non déclarées ou qui n’ont pas remédié aux défaillances constatées par l'administration est créé. Sur amendement du gouvernement, le préfet pourra s’opposer à l’ouverture d’écoles hors contrat soutenues par un État étranger hostile à la République.
Pour assurer aux femmes une égalité de droits, le texte renforce la protection des héritiers réservataires sur les bien situés en France lorsque la succession relève d'une loi étrangère qui ne reconnait pas l'égalité des enfants héritiers. Il traite aussi de la polygamie sous l’angle des titres de séjour et des pensions de réversion et renforce la lutte contre les mariages forcés. En cas de suspicion, l’officier de l’état civil devra s'entretenir individuellement avec chaque futur époux. Si des doutes persistent, il devra saisir le Parquet.
La délivrance de certificats de virginité devient interdite et sera punie d'un an de prison et de 15 000 euros d'amende. Un amendement des parlementaires prévoit aussi de punir le fait de contraindre une personne à se soumettre à un tel certificat.
5- Le contrôle des associations cultuelles et des lieux de culte
La loi modifie la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État et la loi du 2 janvier 1907 sur l’exercice public des cultes.
Les associations cultuelles devront se déclarer auprès du préfet tous les cinq ans. Les dons étrangers de plus de 10 000 euros et la cession de lieux de culte à un État étranger devront être déclarés. Le préfet pourra s’y opposer lorsqu’un intérêt fondamental de la société est en jeu.
Pour plus d'autonomie financière, ces associations pourront détenir et exploiter des immeubles de rapport acquis par legs ou don. Les ressources annuelles qui pourront être tirées de tels immeubles sont plafonnés à 50%.
Les communes et départements dans le cadre de l'amendement "mosquée de Strasbourg", devront informer préalablement le préfet, avant toute garantie publique pour un emprunt destiné à la construction d’un édifice cultuel, ou la conclusion d’un bail emphytéotique (bail de longue durée).
Pour les associations dites mixtes, qui relèvent de la loi du 1er juillet 1901 et qui exercent un culte, leurs obligations, notamment administratives et comptables, sont alignées sur celles des associations cultuelles : certification dans certains cas de leurs comptes, distinction comptable de leurs activités cultuelles du reste de leurs activités, déclaration de l'argent provenant de l'étranger... Le préfet pourra enjoindre à une association dont l'objet est en réalité l'exercice d'un culte à se déclarer comme association cultuelle. Aujourd'hui, plus de 90% des mosquées sont sous le régime de loi de 1901.
La loi modifie la loi du 9 décembre 1905 sur la police des cultes. La peine en cas de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence commise par un ministre des cultes est portée à cinq ans de prison. La tenue de réunions politiques dans des lieux de culte est plus sévèrement sanctionnée. L’organisation d’opérations de vote pour des élections politiques françaises ou étrangères y est clairement prohibée. Le juge pourra, par ailleurs, interdire à une personne coupable d'un délit à la police des cultes de paraître dans les lieux de cultes. Le préfet pourra fermer provisoirement les lieux de culte en cas d'agissements provoquant à la haine ou à la violence.
Source: viepublique.fr